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Date de création : 23.05.2017
Dernière mise à jour : 07.03.2025
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Le luxe et le local

Publié le 17/11/2017 à 15:33 par fanthomas Tags : travail sur new york homme fond histoire mode automne papillon signature patrimoine

 Après un rachat par le groupe Rosewood et quatre années de travaux, l’Hôtel de Crillon était attendu au tournant. Depuis sa réouverture, le 5 juillet, le palace soigne donc sa communication, mettant en avant sa façade édifiée en 1758, ses suites décorées par Karl Lagerfeld, mais aussi une collaboration plus confidentielle : les uniformes du personnel signés Hugo Matha, créateur parisien de sacs dont c’est ici la première incursion dans le façonnage de vêtements. « Pour décrocher ce contrat, j’étais face à dix autres designers, dont certains bien plus connus et issus de grandes griffes », se souvient le jeune homme de 26 ans. À deux pas de là, le Plaza Athénée a fait également appel à un nom confidentiel de la mode, le chausseur Carvil fraîchement ressuscité, pour fabriquer, sur commande et pour les fêtes, des chaussons rouges, couleur signature du palace de l’avenue Montaigne. Le Mandarin Oriental de New York a, quant à lui, sollicité Rodarte pour une collaboration autour d’une écharpe siglée du nom de l’hôtel et a même exposé et commercialisé des croquis originaux de ses créatrices, les sœurs Mulleavy. Enrôler des maisons de mode pour offrir un supplément d’âme à un établissement hôtelier se pratique depuis une quinzaine d’années : Castelbajac et Kenzo avec Sofitel, Michael Kors avec W Hotels, Yohji Yamamoto avec Royalton… Mais aujourd’hui, la tendance mute. Plutôt que d’avoir recours à de grands noms dont la signature risque d’apparaître au même moment dans plusieurs projets, le secteur préfère tabler sur des marques de niche ou des personnalités pointues. Et qu’importe si les clients ne les identifient pas au premier coup d’œil, elles donnent à l’adresse ce côté « initié » qui la rend plus branchée. « La riche clientèle n’a aucun problème à partir trois jours en week-end à Shanghaï pour essayer les nouveaux services d’un hôtel. » Laurent Delporte, spécialiste de l’hôtellerie de luxe L’habit des équipes (voituriers, concierges, majordomes, garçons de chambre…) est souvent au cœur de la demande. « Un hôtel se doit de raconter une histoire et de fairevivre un patrimoine. Or, dans cette narration, le vestiaire joue un rôle-clé », observe le magnat Aby Rosen, propriétaire de plusieurs dizaines d’établissements. Parmi eux, le Gramercy Park Hotel de New York, qui a fait appel depuis son ouverture en 2006 à Narciso Rodriguez, Sophie Theallet et au chapelier Nick Fouquet. « Dessiner la garde-robe d’employés a du sens, abondent Tim Weiland, Donna Kang et Alan Eckstein de la marque Timo Weiland, qui ont rafraîchi cet automne les uniformes de la chaîne américaine Crowne Plaza Hotels & Resorts. Nos vêtements ont au fond le même objectif que ces hôtels : se révéler le plus fonctionnel possible. » Lire aussi : Chanel, ça c’est palace ! Les professionnels recrutent moins ces nouveaux talents pour leur notoriété que pour leur savoir-faire esthétique, pratique et durable. « Cela ne se fait pas ailleurs, mais nous avons décidé d’habiller le personnel de l’Hôtel de Crillon en semi-mesure, avec des habits ajustés aux mensurations de chacun, raconte Hugo Matha. J’ai fait 190 prototypes pour, au final, 90 tenues sobres et épurées, sans cravate ni nœud papillon. » Jacques Oudinot, directeur de l’établissement, se félicite : « Nous n’avons pas choisi Hugo pour être à la mode, mais pour qu’il modernise les vêtements vers un luxe intemporel. Ils sont à la fois les outils de travail de nos collaborateurs et la vitrine du palace auprès de nos hôtes. Et ça fonctionne : les clients nous demandent souvent d’où vient tel gilet ou telle jupe plissée. »